
La Villa / Frac-Collection
Première antenne du Frac Franche-Comté, La Villa / Frac-Collection est installée au sein de la Villa Lamugnière à Arc-lès-Gray, avec le concours de la Ville et de l'État, dans le cadre du dispositif "Mieux produire, mieux diffuser".
La Villa / Frac-Collection est un lieu modeste, par ses dimensions, ce qui ne l'empêche pas de vous proposer les mêmes prestations qu'au Frac situé à Besançon, à savoir une exposition d'œuvres de sa collection, des ateliers pédagogiques, une programmation culturelle composée de conférences, et de rencontres avec des artistes, une médiation adaptée, etc. Ce à quoi s'ajoute le Musée Numérique conçu par la Villette, grâce au partenariat avec ArtKaravane. Une antenne bien sûr animée par les médiatrices et médiateurs du Frac!

la 1ère exposition de La Villa / Frac-Collection
Pour sa première exposition, La Villa / Frac-Collection propose vingt œuvres issues de la collection du Frac Franche-Comté. Au rez-de-chaussée, Les assoiffés, de Thierry Liegeois ouvre la marche dans une ambiance de cave voûtée. Le son délicat d'un goutte à goutte amène une forme de vie au paysage désertique peuplé d'être hybrides et grotesques, bouche ouverte et langue tirée vers le ciel, attendant avec insistance les gouttes d’eau qui leur sont distillées avec parcimonie par un système d’irrigation.
Une installation suivie par celle, plus légère, de Charlotte Moth, Millefleur, qui présente plusieurs centaines de feuilles réalisées en tissu coloré par une costumière de théâtre au moyen de formes en métal et accrochées au mur blanc au moyen d’épingles. L’artiste revisite le style dit "millefleurs" des tapisseries du Moyen Âge européen, telles les tapisseries de La Dame à la licorne (fin XVe, début du XVIe), aux foisonnants motifs floraux très en vogue à cette époque.
Sur les autres murs de la pièce, nous retrouvons les tirages photographiques Tales #07 (Estoril, Portugal, September 2007) de Daniel Gustav Cramer, déclinant de subtiles nuances et changements, Soleils fantômes de Sarah Ritter, où l'on découvre une source lumineuse, presque spectrale et paillettée, éclairant un sol. Sur la véritable dimension des choses n°3 d'Estefania Penafiel Loaiza, nous observons que le blanc immaculé du papier est seulement troublé par l’image d’un support de globe terrestre et l’ombre qu’il projette. Le globe lui-même est absent, seulement suggéré par cette ombre et par une pliure du papier évoquant la ligne imaginaire de l’équateur. À partir d’objets collectés qui symbolisent le savoir ou la science, l’artiste révèle le désir humain de se mesurer à ce qui le dépasse.
Au milieu de la pièce, trône la délicate sculpture en cristal Souffle de Susanna Fritscher. D’une extrême finesse, l’œuvre matérialise l’air expulsé par les souffleurs de verre, le figeant à jamais dans une enveloppe de cristal.

Le film Real Remnants of Fictive War V de Cyprien Gaillard nous attrape au passage, tandis que nous nous rendons dans l'avant-dernière pièce du rez-de-chaussée, dont les boiseries anciennes ont été conservées. Cinquième d’une série réalisée entre 2003 et 2004, on y voit une épaisse fumée blanche envahir le parc d’un château. Poussant la caméra à 32 images par seconde, l’artiste crée un ralenti qui confère au film un caractère fictionnel, accentuant l’aspect pictural et romantique d’un paysage évoquant les oeuvres d’Hubert Robert, à propos duquel Diderot écrivait : "Il faut ruiner un palais pour en faire un objet d’intérêt."
Dans la pièce suivante est accrochée l'installation Biographie de Jean-Christophe Norman, série de peintures de petits formats matérialisant certaines sensations éprouvées par l’artiste lors de ses déambulations dans de grands ensembles urbains à travers le monde. Face aux toiles, un écran diffuse l'œuvre vidéo captivante et hypnotique d'Hicham Berrada, Presage 25/01/2018 20h22, captation d’une performance passée. En plan resserré, la vidéo d'une beauté inquiétante permet ici une totale immersion dans la composition liquide et dans l’infiniment petit.
Au centre, nous pouvons observer sous toutes ses coutures la jarre aux fissures assumées Cosmos de Clément Richem, qui représentante des cycles de vie et des processus de transformation dans le temps, tandis que dans l'alcôve, est installé le tourne disque modifié de Katie Paterson, As the world turns sur lequel est posé un disque vinyle des Quatre saisons de Vivaldi, tournant à la vitesse de rotation de la terre sur son axe. Il faudrait quatre années pour l'entendre du début à la fin, la lenteur de la rotation rendant presque impossible la perception auditive et visuelle du mouvement du disque. Cette musique et cet objet familiers deviennent ici l’occasion de prendre conscience de notre expérience du monde naturel.

Un chant d'opéra nous attire dans la dernière pièce plus intime de ce rez-de-chaussée. Bâtie sur des faits historiques, la narration proposée ici par Nina Laisné met ici à l'épreuve notre regard sur l'Histoire. Nous y retrouvons son dessin Naundorff et la joueuse de tympanon représentant l’horloger Naundorff et la joueuse de tympanon, exécuté à la manière des caricatures de la fin du XVIIIe siècle dénonçant les excès de l’aristocratie. La photo La joueuse de tympanon, représente la reine musicienne, assise devant un tympanon, instrument à cordes frappées considéré comme l’ancêtre du piano, logé dans la structure d’un clavecin. Face à elle, la réplique altérée du fameux mécanisme Air n°6 [Plaintes d'une femme auprès du berceau de son fils] d'apparence fidèle à la pièce d’origine, il comporte un élément qui révèle sa nature contrefaite : en remplaçant l’un de ces airs par une berceuse que la reine chantait à ses enfants, l’artiste invoque le caractère étrangement prémonitoire de ce poème d’Arnaud Berquin, en écho au destin inéluctable de la famille royale. Enfin, la vidéo L'air des infortunés reconstitue une scène de procès, dans laquelle la pièce à conviction est la contrefaçon du mécanisme de l’automate, et propose une narration fantasmée se nourrissant des zones de flou de l’Histoire. Des œuvres qui marquent également l’intérêt profond de Nina Laisné pour les musiques anciennes et traditionnelles et sa fascination pour les prouesses horlogères.

la suite au 2e étage
Nous revenons sur nos pas pour monter l'escalier ancien de la Villa, le long duquel nous pouvons observer la suite de la série la véritable dimension des choses, avec le n°6 qui révèle la main de l'artiste, Estefania Penafiel Loaiza. Encore couverts d'encre noire, à l'issue d’une performance liée à la vidéo La crise de la dimension. À l'étage, sur notre gauche entre les deux salles d'activités, figure le dessin At dawn on the third day I began de Glen Baxter à l’énigmatique légende, "Le troisième jour, à l’aube, j’ai commencé à me dire qu’effectivement, nous étions peut-être bien perdus", met en scène deux hommes dans une étrange histoire en provoquant la rencontre d’objets, d’espaces et de temps déconnectés.

Nous traversons l'espace enfant pour rejoindre la verrière de la Villa, où est exposée l'installation les 8 erreurs de Rodolphe Huguet. À première vue, il s’agit d’une bouteille de champagne brisée mais, comme nous y invite le titre, il faut regarder de plus près. Protégés dans une vitrine conçue par l’artiste, des éclats de verre sont disposés au niveau du regard. On distingue alors parmi les bris épars aux arêtes vives, certains fragments délicatement taillés en forme d’émeraudes.
Cet espace est composé d'un escalier en vis alambiqué et d'une entrée vers la Grande Salle où se tiendront les conférences et rencontres, et où est installé le Musée Numérique, qui vous emmène à la découverte des milliers d'œuvres de musées du monde entier! On y entend le grondement de l'installation sonore Thunder d'Hannah Rickards... 12 fois par heure à intervalles irréguliers, un son étrange retentit. La soudaineté du son émis créée la surprise. Comme l’indique son titre, Thunder évoque un coup de tonnerre. À travers cette œuvre sonore et immatérielle, le spectateur surpris, convoque le souvenir sonore et parfois visuel de ce phénomène naturel.

Nous sortons, pour découvrir le superbe parc arboré et classé de la villa Lamugnière, et son pavillon, dédié à l'installation immersive - sonore également - de Dominique Blais, intitulée Sans-titre (Lustre). oeuvre immersive réalisée en 2008 à l’occasion d’une exposition à La Galerie, centre d’art contemporain de Noisy-le-Sec, qui s’inscrit dans cette démarche. À partir d’enregistrements effectués dans les moments d’inactivité du lieu, comme les grincements de parquet ou les écoulements d’eau, l’artiste compose une trame sonore presque fantomatique. Cette œuvre constitue une empreinte acoustique du bâtiment, qui fut autrefois une maison d’habitation. Elle nous invite à un voyage dans le temps et l’espace et fait résonner un passé presque effacé. L’artiste interroge ainsi notre capacité à percevoir ce qui demeure hors-champ.
La Villa / Frac-Collection est un lieu à vivre, ouvert à tous : pour découvrir, apprendre, créer, s’émerveiller… et revenir.
Annexe / Documents
- Livret de l'exposition (pdf, 21.43 Mo)