Nina Laisné, L’air des infortunés / La collection voyage
La présentation des oeuvres de Nina Laisné à Art Fair Dijon fait suite à une exposition monographique présentée au Frac du 13 octobre 2019 au 12 janvier 2020.
«Le travail de Nina Laisné se situe au croisement entre photographie, mise en scène vidéo et pratique musicale. Proposant des oeuvres empreintes d’une certaine étrangeté, l’artiste se détache d’une narration linéaire et cherche des points de correspondance entre musique traditionnelle et langage cinématographique. L’histoire de la musique s’intègre dans ses oeuvres, notamment dans les rapports ambigus qu’elle entretient avec la fiction. Cette intrusion progressive d’éléments musicaux est aussi le reflet d’un goût prononcé pour la pluridisciplinarité, pour le métissage entre les arts et pour les formes hybrides qui peuvent en résulter.»1
Suite à une résidence de l’artiste au Frac Franche- Comté en 2019-2020, trois oeuvres : un mécanisme horloger, un dessin et un film, ont été conçus par Nina Laisné ; elles sont ensuite venues enrichir la collection du Frac puisque les problématiques du temps et de la musique dans l’oeuvre de Nina Laisné sont aussi celles qui traversent la collection du Frac elle-même depuis 2006.
Ces trois oeuvres sont intimement liées : «La première pièce, produite en collaboration avec la Plateforme Technologique Microtechniques Prototypage de Morteau2, consiste en une réplique du mécanisme de La joueuse de tympanon3. Cet automate, offert à Marie-Antoinette en 1785, représente la reine musicienne, assise devant un tympanon4 logé dans la structure d’un clavecin, frappant les cordes à l’aide de petits martelets. L’étonnante singularité de cet automate réside dans le fait que la musique provient réellement du geste sur l’instrument miniature, et non du mécanisme lui-même. Sous la robe de la figurine se cachent de nombreux rouages qui engendrent les mouvements de bras. Ce mécanisme propose une variation de huit mélodies, dont l’une est attribuée à Gluck, un des compositeurs favoris de Marie-Antoinette et initiateur du classicisme viennois.
L’oeuvre de Nina Laisné, si elle semble être une réplique parfaite du mécanisme, en est en réalité une contrefaçon, aux mélodies altérées. La seconde pièce est une vidéo qui s’appuie sur la version falsifiée du mécanisme, proposant une réflexion sur les notions de mémoire et d’imposture.
L’artiste s’est en effet intéressé aux «faux Louis XVII», nombreux imposteurs qui prétendirent être le dauphin, et notamment un certain Karl Wilhelm Naundorff, horloger de métier et personnage insaisissable, qui eut de multiples démêlés avec la justice.»
La caricature imaginée et dessinée par Nina Laisné lie la fiction présente dans le film et dans le mécanisme en faisant se rencontrer La joueuse de Tympanon et le personnage de Naundorff.
Avec cette présentation à Art Fair Dijon, le Frac Franche-Comté donne à voir et à entendre un ensemble d’oeuvres de Nina Laisné qui oscillent entre réalité et fiction, entre Histoire et faux-semblants.
1, 3, 5 Extrait de l’édito de Sylvie Zavatta, commissaire de l’exposition et directrice du Frac pour l’exposition L’air des infortunés, du 13 octobre 2019 au 12 janvier 2020.
2 Collaboration avec Francis Plachta, Plateforme Technologique Microtechniques et Prototypage, Morteau
4 Automate conçu par l’horloger Peter Kintzing et l’ébéniste David Roentgen, et conservé au Musée des Arts et Métiers de Paris.